FRANÇOIS MOURIÈS
PHOTOGRAPHY
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Les vastes étendues désertiques et arides du sud de la province de la Navarre espagnole, choisies par Terry Gillian pour son désastreux « Don Quichotte», semblent avoir déteint sur cette poignée de villages qui les bordent, imposant leur rythme et leur silence. Les repères ici sont faussés, pas d’éléments particulièrement remarquables dans les ruelles vides où s’alignent les maisons basses aux volets clos, adossées aux bourrelets de grès semblables à une coulée de lave, repliées sur elles mêmes et sur leurs histoires modestes. Le quotidien a pris le pas sur les allées et venues qui rythment la vie des habitants au gré des saisons et des récoltes.De ce désert sans ombre, craquelé, chauffé à blanc en été, parsemé de collines érodées et de ravins tortueux, se dégage cette impression mystérieuse et spectaculaire que l’on peut éprouver devant un phénomène géologique hors du commun. Le magnétisme de cet espace vierge et lunaire m’a ramené régulièrement sur ce lieu, et ce n’est que plus tard que j’ai ressenti le besoin de mieux comprendre ce sentiment confus qui apparaissait en traversant les villages voisins pour m’y rendre.L’architecture, l’ornement discret des façades hermétiques, les tonalités passées des habitations et la lumière qui les révèlent, m’évoquaient des bribes de scènes déjà vues, comme celles d’ un rêve dont on se souvient mal et que l’on tente de reconstituer. Une suite d’instants figés comme un lent travelling ou l’on perçoit en fond sonore le souffle d’un vent tiède continu, parfois brutalement interrompu par un appel au loin, comme dans un film d’Antonioni. A chaque heure du jour ou de la nuit ressurgissaient, au gré de mes déambulations, ces réminiscences furtives au coin d’une rue déserte, devant une façade aveugle ou aux abords d’un silo récemment fermé pour cause de crise économique.Cette lente exploration parait emprunter à chacun de mes voyages, un itinéraire plus métaphorique que documentaire, jusqu’à en perdre le sens des réalités. Le temps n’a plus prise parmi ces paysages urbains, fantomatiques parfois, qui ressemblent à des décors de théâtre, presque fictifs. D’une banalité apparente, d’un formalisme de surface, vide de tout ce qui pourrait s’apparenter au pittoresque, se dégagent un climat étrange et magique, provoqué par des éléments soudains et inattendus que j’ai tenté de mettre en image comme pour m’assurer de leur existence.

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